Ce lundi, Kiev a annoncé avoir abattu l'amiral Viktor Sokolov lors d'une frappe en Crimée.Une information démentie par Moscou, qui a publié un certain nombre d'images du patron de la flotte russe en mer Noire.Mais que penser de ces preuves de vie ? Nous avons voulu vérifier.
La flotte russe se retrouverait-elle orpheline ? C'est ce que laisse penser une récente annonce de Kiev. Ce lundi 25 septembre, les services de renseignement ukrainiens ont annoncé que l'amiral Viktor Sokolov, chargé du commandement de la flotte russe en Mer Noire, avait été tué après une frappe ukrainienne sur son quartier général, à Sébastopol.
Une affirmation rapidement démentie par le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, qui a rapidement fourni des preuves. Mais sont-elles fiables ? Nous avons vérifié ces images.
Des preuves visuelles qui ne démontrent rien
Dès le mardi 26 septembre, le canal officiel du ministère russe de la Défense a publié des images montrant le patron de la flotte russe bel et bien vivant, participant en visioconférence à une réunion ministérielle. Sur les clichés et la vidéo, on aperçoit en effet un homme portant l'uniforme du chef d'armée avec la plaque à son nom. Les lettres ЧФ, les initiales de la flotte de la mer Noire en cyrilliques, sont affichées en bas de son écran.
Or, tous les indices laissent penser que la réunion s'est tenue le jour même. L'un des clichés montre, en haut à droite, la date de prise de vue, à savoir le 26 septembre, à 11h20. Ensuite, lors de sa prise de parole, le ministère russe de la Défense, qui préside la réunion, évoque des événements qui se sont tenus après la destruction du quartier général, le 21 septembre. Le ministre Sergueï Choïgou révèle ainsi la prétendue destruction de deux chars Leopard (dont nous vous parlions dans cet article), que Moscou a revendiqué le vendredi 22 septembre.
Reste qu'il est tout à fait envisageable que la vidéo de Sokolov soit une ancienne capture. Si nous n'avons pas détecté une quelconque manipulation de la vidéo, rien ne permet non plus d'en vérifier de manière indépendante son authenticité, le chef de la flotte russe ne prenant pas la parole.
Face à ces critiques, les médias russes ont diffusé de nouvelles images ce mercredi sur Telegram. Elles montrent l'amiral en train de récompenser une équipe de football qui a remporté le championnat militaire. Et cette fois-ci, le chef d'armée prononce quelques mots. Mais certains éléments interrogent. Tandis que le son QG à Sébastopol, capitale de la péninsule ukrainienne annexée par Moscou en 2014, a été frappé quelques jours plus tôt, il ne mentionne à aucun moment l'attaque. Fait surprenant pour une première prise de parole médiatique après un événement qui aurait coûté la vie à plusieurs "hauts commandants", selon Kiev. D'autant que l'extrait ne présente aucun repère temporel, à l'exception de cette compétition sportive au sein des armées. Or, les marins ont bien gagné ce tournoi… le 18 septembre. Trois jours avant la frappe sur le QG.
En recherchant des images de ce championnat, nous avons retrouvé le reportage d'une chaine de télévision locale de Sébastopol. Diffusé le 21 septembre, il évoque justement la cérémonie de remise des prix de cette équipe composée de marins. Et tout laisse suggérer qu'il s'agit du même événement auquel Viktor Sokolov est censé avoir participé ce mercredi.
Non seulement deux personnes interrogées par la chaine locale se retrouvent sur la vidéo publiée ce mercredi par des médias russes. Mais la médaille et la coupe sont aussi similaires en tout point. De plus, la cérémonie s'est tenue précisément dans la même salle, à Sébastopol.
En résumé, les deux preuves apportées par Moscou ne démontrent pas pour l'heure que l'amiral est toujours en vie après la frappe sur son quartier général. Mais du côté ukrainien, les preuves manquent aussi à l'appel. Ce mardi, sur Telegram, les Forces d'opérations spéciales ont nuancé et reconnu que les "unités clarifient l'information" au sujet de la mort de Sokolov. Interrogé par notre équipe sur place, Dmytro Pletenchuk, porte-parole de la marine des forces armées ukrainiennes, admet lui aussi "ne pas pouvoir confirmer sa mort dans l'immédiat". À l'heure actuelle, la situation reste confuse d'un côté, comme de l'autre.
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